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Face au pouvoir, comment s’organiser ?

Quatre ans après l’avènement des Gilets Jaunes, un nouveau soulèvement saisit la France, plus particulièrement dans ses grandes villes et chefs-lieux. La réforme des retraites, assénée aux travailleurs et aux citoyens à coups de 49-3, ne cesse de générer un mécontentement toujours plus ancré dans la tradition socialiste du mouvement prolétarien français des deux siècles derniers. Si l’usage de la grève généralisante et celui de la manifestation sauvage nous sont sympathiques, il ne faut cependant pas s’en contenter !

Maintenant qu’une profonde frontière a été tracée entre classes populaires et classes bourgeoises – tant issues du privé financier que du public bureaucratique -, il nous faut désormais nous armer d’un matériel bien plus redoutable que la poubelle en feu : celui du contre-pouvoir politique.

Si les institutions gouvernementales semblent insérées dans le paysage politique local comme national depuis toujours, il est bon de rappeler que ces bureaux d’élus qui ne rendent de comptes à personnes sont des entités et des structures purement intéressées, façonnées pour conserver le pouvoir en place. La logique gestionnaire de cette vision étatisée que nous avons de la politique n’est pas un horizon indépassable, comme nous avons – légitimement – tendance à l’imaginer. En réponse à cela, nous devons démocratiser notre vie, et ainsi répondre à la République par la Démocratie.

En s’emparant de ce mot dévoyé, nous reconnaissons la capacité de chacun à participer à la vie commune et citoyenne, à vivre en société et non en marge d’un processus de production et de consommation qui concerne tout le monde, que cela soit économiquement, écologiquement ou politiquement. Pour cela, il nous faut créer des assemblées démocratiques et populaires, et les mener sur deux fronts :

  • Premièrement, du côté des municipalités, pour nous réapproprier nos espaces de vie commune, se substituer à la bureaucratie menée de haut en bas, administrant les territoires plutôt que de laisser leurs habitants gérer eux-mêmes les enjeux de leur quotidien – qu’ils connaissent mieux que quiconque.
  • Deuxièmement, du côté des lieux de travail, pour s’affranchir des finalités factices du profit, de la rentabilité et de l’accumulation de capitaux – purement déconnectées des nécessités réelles de la population. Celles-ci ne peuvent trouver de réponses et de solutions que par la concertation des premiers concernés – et non pas par une décision hiérarchique qui a la prétention de savoir mieux que tout le monde. Faisons dialoguer producteurs et consommateurs, offreurs et demandeurs pour appréhender correctement les enjeux politiques, économiques et écologiques soulevés derrière ces processus.

Nous serons nombreux à être un peu décontenancés à l’idée d’engager un dialogue régulier, mensuel, bimensuel ou hebdomadaire en fonction des besoins, avec nos voisins ou nos collègues de travail – je ne m’exclus pas de cette possibilité. Nous avons des différends avec eux, de divers degrés : et c’est pourtant cela qui nous intéresse. La politique, originellement, c’est la gestion de la Cité, la façon la plus noble de régler les litiges entre concitoyens, mais également de proposer des alternatives, des chemins à emprunter ou des modifications à faire !

Cette Démocratie ne doit pas se limiter à une simple somme d’assemblées générales où chacun discute brièvement puis repart penaud, certes démocratisé, mais peu sorti de sa condition, aliénée par un quotidien morne – auto, boulot, dodo pour les Ruraux ; métro, boulot, dodo pour les Urbains ; vélo, boulot, dodo pour les épargnés des migrations pendulaires. Nous devons ancrer cette pratique comme une habitude citoyenne, où les décisions s’opèrent conséquemment, et se supplantent aux volontés des élus municipaux, départementaux et régionaux, et à celles des grands patrons, dirigeants et actionnaires. En formant une confédération d’assemblées démocratiques, une structure organisée par et pour les classes populaires est mise en place. La coordination la plus spontanée mais réfléchie s’opère – et c’est bien l’horizon vers lequel il nous faut avancer.

À ces échelons confédéraux « plus hauts » en densité et en géographie, fixons des représentants, élus ou tirés au sort, qui auront des comptes à rendre ou seront révoqués par les assemblées correspondantes si cela s’avère nécessaire ; ainsi, on ne saurait voir une nouvelle caste de représentants élus émerger, et l’on verrait nos intérêts locaux s’additionner à ceux d’autres localités pour se concerter et décider quelles décisions adopter.

Cette société que nous décrivons n’est pas une idylle irréalisable : loin des manuels scolaires ou des journaux et médias produits en série par les oligarchies concurrentielles des ploutocrates, les Démocraties ont pu voir le jour plus d’une fois dans l’Histoire, inquiétants systématiquement les dictateurs voisins qui voyaient en ces expériences un dangereux remède à leur tyrannie. Face à Emmanuel Macron, petit despote «démocratiquement élu » par un peuple asséné de publicité politique et restreint dans son choix de candidats, il nous faut mettre en œuvre la véritable Démocratie.

Ne nous contentons pas de nous opposer à la mascarade orchestrée par la bourgeoisie ; ceux qui mèneront la danse seront ceux qui seront force de proposition et de pertinence, dans un monde où le ridicule fait office de règle de conduite dans les milieux politiques. Ne nous interposons pas seulement à cette réforme des retraites, créons les conditions propices à une gestion démocratique et populaire de nos temps d’activité, mais aussi de nos temps de repos !

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