François BEGAUDEAU souriant lors de l'entretien

Deux ans après, toujours en quête de démocratie vécue

Retour sur notre entretien avec François BEGAUDEAU

Il y a deux ans, le 9 avril 2023, nous tournions un long entretien avec François BEGAUDEAU. C’était un dimanche de Pâques. Tandis que d’autres cachaient des œufs dans des jardins, nous avions choisi de poser des questions ; et d’en poser beaucoup. C’était un grand week-end, et pourtant nous étions là, ensemble, autour d’un repas copieux, à parler politique, art et punk rock. Ce jour-là, avant les micros, il y a eu une grande tablée. Une photo en témoigne, et elle dit quelque chose de ce que nous cherchons à faire : partager des idées, du pain, et parfois, une lutte — toujours à plusieurs.

Pourquoi BEGAUDEAU ?

Lorsque nous avons lancé le Mouvement Municipal à l’été 2022, une question nous obsédait : comment faire entendre des idées radicales, matérialistes, égalitaires, dans une époque saturée de discours creux ? Peu de figures médiatiques abordaient frontalement les limites du régime représentatif, ou parlaient de démocratie directe, d’émancipation populaire, d’autonomie locale. François BEGAUDEAU faisait partie de ces rares voix. Avec Histoire de ta bêtise (2019), Notre Joie (2021), puis Comment s’occuper un dimanche d’élection (2022), il avait ouvert des brèches dans le récit dominant.

Dans nos mails préparatoires, nous lui écrivions :

« Ce que vous formulez dans vos essais résonne avec les intuitions que nous posons dans notre manifeste. Il y a là des points de convergence, et aussi des terrains de friction que nous avons envie d’habiter. »

 

Il a accepté. Il a même signé « à trois mains » certains passages de notre plan d’entretien, notamment sur son rapport au punk et à la musique comme expression politique. Nous savions alors que nous tiendrions là quelque chose de précieux.

Si nous avons invité BEGAUDEAU, c’est parce qu’il formulait une critique radicale mais articulée du système représentatif. Un passage marquant d’ Histoire de ta bêtise résume bien cette rupture avec les habitudes politiques :

« Tu es le sujet idéal de la monarchie républicaine. L’élection par quoi le citoyen délègue et donc abdique sa souveraineté est le pic de jouissance de ta libido citoyenne. Sur ce point comme sur le reste nous sommes à fronts renversés. Tu tiens l’élection pour le lieu exclusif de la politique, je tiens que la politique a lieu partout sauf là. Je sors du jeu au moment où tu y entres. Nous nous croisons. »
Histoire de ta bêtise, Fayard, 2019

Ce refus du simulacre démocratique est aussi un appel à se réapproprier le politique au quotidien — ce que nous appelions, nous, la démocratie directe. Plus loin, il démasque l’usage social du vote comme rite de déresponsabilisation :

« L’acte de voter par toi tant célébré est un non-acte. À tout le moins un acte non politique. La politique se fabrique par réunion d’individus parlants, le vote est solitaire et muet. Ce geste hors de vue n’acquiert une consistance collective qu’au prix d’une abstraction. »
Histoire de ta bêtise, Fayard, 2019

Ce rapport à la parole et à l’agir collectif est au cœur de notre pratique municipale. Et ce qui nous a touché aussi, c’est sa manière d’interroger le rôle social de l’artiste. Dans Histoire de ta bêtise, il écrit :

« Tu me confies ton envie de consacrer un numéro de ta revue littéraire à la présidentielle, confirmant que ta coutumière réticence à l’art engagé n’est pas une position esthétique mais une position sociale, celle qui te maintient hors de l’urgence à s’engager, dans une zone où l’engagement est un sujet de philo de terminale – une famille délogée ne rédige pas trois parties pour décider si elle s’engage avec le DAL. »
Histoire de ta bêtise, Fayard, 2019

Cette passage entre en résonance avec l’un de nos propres constats : l’art, comme la politique, ne peut pas être neutre. Il est situé. Il dit un monde, et parfois il peut en ouvrir un autre. BEGAUDEAU ne nous intéresse pas parce qu’il aurait « des solutions » — il nous intéresse parce qu’il trouble les évidences, refuse les consensus paresseux, et invite à penser en dehors du cadre.

Enfin, dans Notre Joie, il pointe une dynamique que nous combattons aussi : la confusion politique comme mode de préservation du pouvoir établi. Il écrit :

« La confusion conforte l’existant en noyant le poisson de sa contestation. La contestation confuse n’est pas seulement impuissante à déstabiliser l’ordre social ; elle le stabilise. »
Notre Joie, Fayard, 2021

C’est contre cela que nous avons voulu parler. Et c’est pour cela que, deux ans plus tard, cet entretien reste pour nous un moment important.

Une discussion fondatrice

Repas partagé avec François BEGAUDEAU, c’est autour de celle-ci qu’a commencé l’échange.

Avant de filmer, nous l’avions convié à déjeuner. Pas un déjeuner vite fait — un vrai festin. Nous savions son goût pour la bière, alors nous en avions apporté plusieurs variétés, artisanales, locales, parfois audacieuses. Il a tout goûté. Il a tout commenté. Le ton était donné : cette rencontre serait à la fois politique et chaleureuse.

L’entretien s’est ensuite étalé sur plusieurs heures. Nous l’avons questionné sans relâche. Il y a eu des moments de tension, de gêne, de rire aussi. Il a paru un instant désarçonné lorsque nous l’avons interrogé sur son rapport intime à la musique punk, ce qui l’y attirait, ce que cette colère disait de lui. Il a pris un temps. Il a répondu. C’était un échange vrai.

Dès l’introduction orale de cet entretien — finalement coupée au montage —, nous avions tenu à évoquer avec lui une notion qui nous avait profondément marqués dans Notre Joie : celle de la panne auditive. Cette idée que même entre proches politiquement, une mésentente, un malentendu peut surgir. Que les textes ne parlent jamais aussi directement qu’on le croit. Nous lui disions ainsi :

« Comme vous vous questionnez dans les premières pages de ce livre, que vaut donc cette adhésion que nous avons avec vos ouvrages ? Où se place la panne auditive ? Au fond, quels livres personnels avons-nous découpés dans les pages des vôtres ? »

Et c’est précisément Notre Joie qui nous avait poussé à cette vigilance, à cette humilité politique :

« L’adhésion à un livre ne garantit rien. À mes yeux d’animal farouche elle
serait plutôt suspecte. Peut-être par surestimation de ma singularité, peut-être par accoutumance au minoritaire, je préjuge qu’entre un lecteur et moi l’entente procède en partie de la mésentente — de la panne auditive.
L’adage dandy minimise l’affaire en considérant tout succès littéraire comme un malentendu ; c’est toute lecture qui l’est. Le livre a fortiori littéraire est un entremetteur déloyal, en tout cas un piètre vecteur de communication. Il y a de la friture. Il y a de la perte dans la traduction. L’attention fluctue, baisse, bifurque vers une course à faire chez Auchan ; au bas mot quatre phrases sur cinq sont oubliées sitôt déchiffrées. Le lecteur lit bien ce qu’il veut. C’est l’effrayante splendeur démocratique de la circulation d’un texte.
Notre Joie, Fayard, 2021

En posant cela dès le départ, nous affirmions une démarche : même avec quelqu’un dont nous partagions tant d’analyses, il nous fallait questionner ce que nous projetions sur ses mots. Étions-nous vraiment alignés ? Et sur quoi, exactement ? Cette précaution a traversé tout l’entretien, et c’est sans doute ce qui en a fait un moment aussi sincère que stimulant.

Et puis il y a eu cet instant lumineux où, se prêtant au jeu, il a imaginé ce que pourrait être une démocratie directe à l’échelle de son immeuble, ou de son quartier. Il a parlé de « comités de voisinage », de « décisions prises au pied de l’escalier », de « coopération sur l’usage du palier ». Il a dit :

« La démocratie, c’est pas un scrutin tous les cinq ans. C’est un truc qu’on fait tous les jours, au plus proche, entre nous. La démocratie, c’est quand je peux influer sur la manière dont le pain est cuit dans la boulangerie d’en bas. »

Ce moment-là, on ne l’a pas oublié.

Ce que ça a produit

Cet entretien a été un tournant pour nous. Relayé par Dany et Raz de Zawa Prod et Kalee Vision, il a atteint 70 000 vues en moins d’un mois. Une première pour une vidéo évoquant le municipalisme libertaire ou la pensée de Bookchin. Jusque-là, les contenus similaires plafonnaient à 20 000 vues — au mieux.

Mais surtout, cet échange nous a mis face à une évidence : la théorie ne suffit pas. Comme le dit BEGAUDEAU dans l’entretien, « la théorie, à un moment, elle doit rester à sa place ». Il nous a fallu accepter cette limite. Cela a nourri des réflexions internes, des remises en question, mais aussi une forme d’urgence : mettre les mains dans le cambouis démocratique.

C’était aussi notre premier grand fait d’armes médiatique. Une parole posée publiquement. Un manifeste filmé. Une archive vivante.

Deux ans plus tard

Depuis, le Mouvement a connu une pause dans sa présence médiatique. Au sein de celui-ci, rien n’a été renié, il y a simplement eu un ralentissement des activités. Nous y avons continué à discuter, à expérimenter, à penser. Et aujourd’hui, le Mouvement Municipal reprend la parole. Pas pour faire du bruit, mais pour dire que nous sommes encore là. Que notre envie de démocratie directe vécue et à vivre, d’émancipation, de coopération, reste intacte.

Ce que cet entretien a produit pour les activistes du Mouvement ne se mesure pas qu’en vues. Il a agi en profondeur. Il a posé la question de la mise en pratique, du passage à l’acte, du « comment on fait vraiment ». Il a déplacé nos lignes. Il nous a aidés à voir que nos discours ne tiendraient pas sans leurs échos concrets dans nos vies et nos lieux, car « la théorie […] doit rester à sa place ».

C’est aussi dans cet échange, alors qu’il n’avait pas encore de nom pour son projet, que BEGAUDEAU évoque pour la première fois l’idée de ce qui deviendra Comme une mule. Environ un an plus tard, le livre paraît, et il y prolonge de manière plus intime, plus désabusée parfois, des réflexions déjà amorcées dans notre conversation. Ce que nous y lisons, c’est une forme de lucidité nue — parfois sombre, jamais cynique — sur les espoirs politiques et les manières de continuer à marcher, malgré tout.

« Croire à la révolution sans y croire est non seulement possible mais pratique. […] J’ai porté haut des idées déjà mises à bas par les peuples qu’elles voulaient servir. Aimé l’utopie pour ce qu’elle promettait, par définition, de n’avoir pas lieu. »
Comme une mule, Stock, 2024

« Je n’ai pas plus de mérite à continuer qu’à avoir commencé. Commencer était une nécessité. Continuer l’est resté. Sans pourquoi. Avec malgré. Malgré le rien. Malgré les gens. Malgré l’impression de tourner en rond ou de tomber dans le vide. On continue parce qu’on ne sait pas faire autrement. »
Comme une mule, Stock, 2024

C’est cette énergie, parfois vacillante, mais jamais abandonnée, que nous partageons. Une politique sans illusion, mais pleine de désir. Une parole qui, si elle chute, se relève pour dire autrement. Dans ce même essai, BEGAUDEAU revient sur les tensions entre art et politique :

« Entre l’art et la politique on arrange des rendez-vous, tant ils semblent faits pour convoler. Or à peine les deux parties installées sur la banquette d’angle d’une brasserie que tout le monde regrette d’être venu. On n’a rien à se dire. On ne se découvre aucun loisir commun. Pas le même agenda, pas le même emploi du temps. Mariage impossible. Carpe et lapin. Machine à coudre et parapluie. »
Comme une mule, Stock, 2024

Et pourtant, malgré ce constat amer, il continue d’écrire. De prendre la parole. Et c’est dans cette parole qu’il affirme, avec force :

« J’ai cru, je crois toujours, qu’il y avait à tenir le versant vécu de la politique. Je crois même que c’est le seul qui vaille, en tout cas pour moi. Ce que j’ai traversé ces deux dernières années me l’a rappelé. On parle, on écrit, et parfois on tombe. Eh bien c’est dans la chute qu’on vérifie de quoi est faite notre position : si elle tient, si elle produit encore du désir, si elle dit quelque chose à d’autres.
Au moins auront-ils évité un rapport sexuel promis au fiasco. Avec l’art la politique ne sait pas y faire. Pendant qu’elle besogne, maladroite, balourde, l’art attend que ça se passe, la tête ailleurs. »
Comme une mule, Stock, 2024

Au sein du Mouvement aussi, nous avons eu à tester la cohérence entre ce que nous disons et ce que nous faisons. Ce que cet échange a produit pour nous : une exigence nouvelle, une conscience plus aiguë de ce que peut — ou ne peut pas — la parole, et une envie renouvelée de pratiquer la politique à hauteur d’humain, là où nous vivons.

Et parce que l’une des phrases les plus fortes de cet entretien résume ce que nous appelons, communément, démocratie vécue, il nous semble juste de la rappeler ici :

« Ce qui m’intéresse dans la commune, c’est que c’est encore une fois un espace où les gens puissent s’impliquer véritablement. Voilà, c’est qu’ils sont en prise directe avec ce sur quoi ils sont en train de délibérer. […] Entre celui qui décide et les conséquences de sa décision, il y a une proximité. »

Nous savons que certaines figures peuvent être clivantes. Mais nous n’avons jamais voulu construire une politique par exclusions successives. Nous avons invité François BEGAUDEAU pour ses idées, pas pour sa biographie. Et ce que nous avons reçu de cet échange, ce sont des propositions, des troubles, des chemins.

Ce que nous vous proposons aujourd’hui, c’est de le (re)voir. Et d’en reparler, ensemble.

Photo de Murray BOOKCHIN

Note sur les groupes d’affinité, Murray BOOKCHIN – Texte

Bookchin, M. (2016). Au-delà de la rareté : L’anarchisme dans une société d’abondance (H. Arnold, D. Blanchard, & A. Stevens, Trad.; Écosociété). les Éditions Écosociété DG diffusion.

Traduction de Daniel BLANCHARD et Helen ARNOLD de « A Note on Affinity Groups ».

Le terme « Groupe d’affinité » est la traduction de l’expression espagnole « grupo de afinidad », qui désignait, avant la prise de pouvoir en Espagne par Franco, une forme d’organisation qui était à la base de la redoutable Federación Anarquista Ibérica, la Fédération anarchiste ibérique (La FAI était constituée des militants les plus idéalistes de la Confédération nationale des travailleurs – la CNT –, l’important syndicat anarcho-syndicaliste espagnol.) Une imitation servile des formes d’organisation et des méthodes de la FAI ne serait ni possible ni souhaitable de nos jours. Les anarchistes espagnols des années 1930 étaient en effet confrontés à des problèmes sociaux entièrement différents de ceux que doivent affronter les anarchistes américains d’aujourd’hui. La forme des groupes d’affinité a cependant des caractéristiques qui conviennent à n’importe quelle situation sociale. Ces caractéristiques ont été souvent adoptées intuitivement par les militants radicaux américains, qui appellent de telles organisations des « collectifs », des « communautés », des « familles ».

Les groupes d’affinité pourraient aisément être considérés comme une nouvelle forme de famille élargie, dans laquelle  les liens de parenté sont remplacés par des relations humaines profondément empathiques – des relations alimentées par des idées et une pratique révolutionnaire communes. Bien avant que le mot « tribu » soit devenu un terme populaire de la contre-culture américaine, les anarchistes espagnols avaient appelé leurs congrès « assembleas de las tribu » – assemblées des tribus. Les dimensions d’un groupe d’affinité sont délibérément maintenues dans des limites modestes, pour permettre à tous les membres un degré d’intimité maximal. Autonome, communautaire, directement démocratique, le groupe combine une théorie révolutionnaire et un style de vie révolutionnaire dans son fonctionnement quotidien. Il crée un espace libre dans lequel les révolutionnaires peuvent se ressourcer, se refaire en tant qu’individus et aussi en tant qu’êtres sociaux.

Les groupes d’affinité sont destinés à remplir la fonction de catalyseurs du mouvement populaire, non celle d’« avant-garde ». Ils y contribuent par des initiatives et par une prise de conscience ; ils ne sont ni un « état-major général » ni une source de « commandement ». Ces groupes prolifèrent au niveau moléculaire et ont leur propre « mouvement brownien »1. Ce sont les situations de la vie qui déterminent la fusion de tels groupes ou leur séparation, et non un ordre bureaucratique venu d’un centre de commande lointain. Dans des conditions de répression politique, les groupes d’affinité offrent une résistance élevée à l’infiltration policière. En raison de l’intimité des relations qui unissent les membres d’un tel groupe, y pénétrer est souvent difficile, et même si une infiltration a lieu, il n’existe pas, dans un tel groupe, d’appareil central capable de fournir à ceux qui l’infiltreraient une vue d’ensemble du mouvement en tant qu’organisme et en tant que tout. Même dans des conditions aussi difficiles, les groupes d’affinité peuvent garder le contact par leurs périodiques et leur littérature.

D’autre part, durant les périodes où les activités peuvent se déployer davantage, rien n’empêche les groupes d’affinité de travailler en commun, très étroitement et à n’importe quelle échelle, selon les exigences de la situation et de la vie. Ils peuvent aisément se fédérer en assemblée locale, régionale ou nationale, pour pouvoir mettre au point des stratégies communes. Ils peuvent aussi créer des comités d’action temporaires (du genre de ceux des étudiants et ouvriers français en 1968) pour pouvoir coordonner des tâches spécifiques. Les groupes d’affinité gardent toujours leurs racines dans le mouvement populaire2. Ils restent fidèles aux formes sociales imaginées par la population au cours de la révolution, non aux impératifs d’une bureaucratie impersonnelle. Leur autonomie et leur ancrage dans une réalité locale résultent, pour ces groupes, dans le maintien d’une grande faculté de jugement et d’une sensibilité ouverte sur des solutions nouvelles lorsqu’elles se présentent. Intensément expérimentaux et diversifiés dans leurs styles de vie, ces groupes agissent comme stimulants les uns par rapport aux autres, et par rapport au peuple en mouvement. Chacun de ces groupes essaie de se donner les moyens de fonctionner pour l’essentiel de manière indépendante. Chacun cherche à rassembler une somme de connaissances et d’expériences aussi étendue que possible, et ce, afin de pouvoir maîtriser les limitations sociales et psychologiques imposées au développement des individus par la société bourgeoise. Chacun fonctionne à la manière d’un noyau et d’un foyer et tente de faire avancer le mouvement révolutionnaire spontané des gens jusqu’au point où, finalement, le groupe est à même de disparaître, en se fondant et se dissolvant dans les formes organiques de la société que la révolution aura créées.

Murray BOOKCHIN

  1. En physique, un mouvement brownien est un mouvement aléatoire et irrégulier, tel celui d’une particule plongée dans un fluide ou un gaz, sans autre résistance ou influence que son interaction avec d’autres particules. ↩︎
  2. C’est-à-dire le mouvement spontané de résistance de la population. ↩︎
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Entretien avec Ben MOREA – Transmettre la flamme insurrectionnelle

Au cours des Rencontres Internationales Anti-Autoritaires célébrant le 150e anniversaire de la première Internationale anti-autoritaire à Saint-Imier en Suisse, nous avons pu réaliser un entretien avec Ben MOREA. Ainsi, il nous faut vous expliquer les circonstances de notre rencontre avec cet homme et la place que celui-ci occupe dans l’histoire de la lutte anti-autoritaire.

Après une vie de tumultes et de luttes perpétuelles, Ben MOREA s’est alors posé au cours des Rencontres Internationales Anti-Autoritaires de cette année 2023 tant pour réaliser une intervention suivi d’une discussion sur l’Animisme révolutionnaire : « Le champ unifié : art, politique et spiritualité » ; que pour réaliser un entretien inattendu avec l’équipe du Mouvement Municipal présente sur place.

Mais qui est Ben MOREA ?

Né en 1940 à Brooklyn, New York ; Ben MOREA est un activiste américain, aujourd’hui principalement artiste et peintre. C’est un homme qui a choisi de vivre discrètement toute sa vie, et pour cause ! Il a longtemps été un anarchiste insurrectionnel, prônant la Révolution par l’action directe et la guérilla urbaine (urban guerilla1), notamment au sein du groupe Up Against The Wall MotherFucker (UAW/MF).

Une organisation violente au message artistique

UAW/MF portait un message à mi-chemin entre le dadaïsme et le situationnisme, prônant un art qui devait être révolutionnaire (art had to be revolutionary). Un art qui s’extirpe du rapport capitaliste et mercantile qui s’en empare. En sachant cela, il n’est donc pas étonnant de savoir que Ben MOREA a été l’ami de la très controversée Valérie SOLANAS, féministe ouvertement misandre ayant tenté d’abattre Andy WARHOL – artiste qui, selon MOREA, a ruiné l’art. En effet, WARHOL orienta l’art vers une forme capitaliste, celle de la pop culture et des ventes aux enchères bourgeoises. UAW/MF cherchait à s’affranchir de cela à tout prix, et ancrait donc sa pratique révolutionnaire dans une démarche artistique qui formait une certaine contre-culture libertaire.

UAW/MF n’était pas la première organisation de Ben MOREA, au contraire. Quelques années auparavant, il fondait avec Dan GEORGAKAS le groupe Black Mask et son journal bimensuel éponyme, sensiblement similaire à UAW/MF sur le fond, bien moins underground sur la forme. De 1966 à 1968, dix numéros de Black Mask furent parus et vendus 5 cents l’unité – mais en réalité ces centimes n’étaient jamais extorqués, Ben MOREA nous confiant qu’il ne faisait jamais payer (I never made them pay) les intéressés, le prix fixé ayant seulement pour but de s’assurer qu’ils ne prendraient pas aveuglément ce journal pour le jeter une poubelle plus loin.

« I sold them 5 cents each, but in reality, I never made people pay. I set up that price to make sure that they won’t throw it away after taking it for free. »

Ben MOREA, juillet 2023

Revêtir le Black Mask

L’organisation UAW/MF fait donc suite à celle de Black Mask, afin de revêtir une apparence bien plus discrète et violente à la fois ; tout particulièrement lorsque de l’autre côté de l’Atlantique prenaient place les évènements de Mai 68 (undercover during the may 68 protests). Ben MOREA entra en contact avec d’illustres protagonistes de cette période de l’histoire socialiste, à savoir les membres de l’Internationale Situationniste.

D’après ses dires, un situationniste allemand aurait été envoyé les rencontrer aux États-Unis, rapportant par la suite à Guy DEBORD et à Raoul VANEIGEM l’idéalisme et la sauvagerie (they said we were wild, we were too wild) des militants américains. C’est Raoul VANEIGEM qui se chargea de vérifier cela par lui-même, rencontrant Dan GEORGAKAS – et non pas Ben MOREA -, ce dernier définissant son acolyte comme un poète idéaliste (he was a poet, he was too idealist and mystic, spiritual), qui n’avait pas été ni même semblé assez convaincant pour les matérialistes radicaux que sont les situationnistes.

Après quelques échanges virulents, l’Internationale Situationniste mis un point final au débat, considérant que ces activistes ne pouvaient être des alliés objectifs. Et Guy DEBORD insulta la personne qui osa les défendre de « crétin confusionniste ». Cette personne, qui n’était autre que… Murray BOOKCHIN – théoricien du municipalisme libertaire, dont nous nous revendiquons -, et ami proche de Ben MOREA.

Une amitié

Bien que les opinions de Murray BOOKCHIN et de Ben MOREA différaient sur de nombreux points, ceux-ci entretenaient une amitié très forte. L’un, municipaliste, avait alors pour habitude de taquiner l’autre, insurrectionnaliste, en le qualifiant d’adepte de BAKOUNINE (he used to say of me that I was a bakuninist). Alors que Ben MOREA préférait se définir comme un anarchiste animiste (animist anarchist).

Une chose est sûre, c’est que leurs désaccords (we used to argue all the time) étaient rapidement mis de côté lorsqu’il s’agissait de critiquer ensemble le caractère narcissique de Guy DEBORD (he had too much ego), qui avait tant mené à l’invective entre ces protagonistes, qu’à la dissolution de l’Internationale Situationniste : « DEBORD expelled anyone that disagreed with him, until he had to expel himself. » ; « I said : “You can’t expel me. I am no member of the Situationists.” ».

Rencontre avec Ben MOREA

Nous avons fait la rencontre de Ben MOREA dans le plus grand des hasards lors des Rencontres Internationales Anti-Autoritaires / Congrès de Saint-Imier de 2023. Alors que nous animions l’emplacement qui nous était dédié pour rencontrer différents libertaires venus du monde entier, ce vieil homme est venu devant nous, d’un pas hésitant, se positionnant une première fois en face de notre stand avant de rebrousser chemin. Il s’est alors ravisé, et est venu à notre rencontre en pointant du doigt un livre de Murray BOOKCHIN que nous avions exposé, expliquant : « I knew him. He was my friend. ». C’est à partir de cette découverte improbable que nous avons commencé à converser sur des sujets tous plus différents les uns des autres, si bien que notre porte-parole et co-fondateur Ἄτη – Até (le gars que vous voyez en entretien) lui a alors proposé de s’entretenir avec nous – offre que Ben MOREA a, comme vous pouvez le constater, acceptée.

Un entretien peut-être précipité ?

L’Internationale ayant été un événement très chronophage dans sa courte durée, en plus d’être épuisant, cette vidéo a été préparée et filmée de façon très rapide et précipitée, sans la possibilité d’effectuer des recherches poussées comme ce fut le cas pour l’entretien précédent avec François BÉGAUDEAU. Nous n’avions pas non plus pu adapter à temps nombre de nos questions en fonction des réponses données par Ben MOREA dès les premières minutes. Car c’est au cours de cet échange que nous constatons un fossé militant entre Ben et nous ; et ce non de façon péjorative nécessairement. Nous sommes, de notre côté, philosophiquement matérialistes et assez ancrés dans la  théorie (autant que la praxis, évidemment), tandis que lui rejette tout cela, pour ne prôner qu’une pratique révolutionnaire violente et totale (total revolution). Cela fut très instructif pour nous, rejoignant ainsi sur quelques points notre premier entretien avec François BÉGAUDEAU et le fait qu’« il faut savoir remettre la théorie à sa place ».

Un échange au-delà de l’entretien

Une fois cet entretien improvisé enregistré, nous avons continué à échanger les jours suivants pendant l’événement avec Ben MOREA, qui continuait à s’y balader. Celui-ci nous a même permis de photographier des exemplaires traités des dix numéros de Black Mask, nous laissant carte blanche pour les traduire en français – et ce, peut-être pour la première fois depuis leur parution. Il n’est pas impossible que les meilleurs articles de ce journal vieux de 50-60 ans paraissent un jour sur notre site ou dans un autre format…! D’autant plus lorsque l’on sait que ces textes sont les derniers rédigés par ce doyen de l’insurrection (I never wrote again after that).

Nous avons également pu parler à Ben MOREA d’une discrète confession de la part de Raoul VANEIGEM, qui fut donnée dans un entretien pour Ballast en 2019 : « Ce fut une erreur de sous-estimer BOOKCHIN et l’importance de l’écologie. Ce ne fut pas ma seule erreur ni la seule de l’[Internationale Situationniste]. » À ce propos, Ben nous confia qu’il était sincèrement ravi que cette prise de recul ait pu avoir lieu après toutes ces années (I’m glad VANEIGEM said a word) – nous nous souviendrons toujours du timide sourire qui s’est alors esquissé sur son visage, le regard nostalgique. Peut-être un jour verrons-nous une réconciliation des méthodes de luttes se forger, précédées par le désir émancipateur de voir advenir une société libertaire ?

Nous tenons à remercier encore une fois Ben pour sa patience, son agréabilité et son apport personnel à notre cheminement libertaire. Nous souhaitons aussi remercier les deux camarades sympathisants du Mouvement que nous avons rencontrés à Saint-Imier, et qui, à l’aide de leurs caméras, ont pu nous permettre de filmer sous trois angles différents pour cet entretien.

 

  1. Les citations présentes en italique ci-dessus sont une retranscription à l’identique des propos que Ben MOREA a pu tenir au cours de notre rencontre avec lui lors du 150e anniversaire de la première Internationale anti-autoritaire à Saint-Imier en Suisse qui se tenait du 19 au 23 juillet 2023. Celles-ci sont présentes afin de conserver une part de sa spontanéité orale dans notre écriture. ↩︎
Recherches en bibliothèque

L’évolution du chantier de la bibliothèque numérique

Depuis ces débuts, nous nous sommes engagé au sein du Mouvement Municipal dans un projet d’envergure : la création d’une bibliothèque numérique. Cette initiative, ambitieuse et porteuse de sens, vise à mettre à disposition une mine de connaissances et de ressources pour l’ensemble des citoyens. Cependant, malgré les avancées significatives, il est important de souligner que ce projet nécessite du temps et des ressources considérables avant de voir le jour.

La construction d’une bibliothèque numérique digne de ce nom demande un travail minutieux et rigoureux. De la sélection des ouvrages à leur numérisation en passant par leur classification, chaque étape requiert une attention particulière. De plus, cela implique des moyens financiers et une implication de personnes conséquentes que le Mouvement Municipal ne dispose pas encore totalement pour ce projet.

En attendant la concrétisation de cette bibliothèque, nous avons décidé de prendre des mesures provisoires pour continuer à mettre à disposition des ressources militantes de qualité en accord avec le ligne tenu dans le Mouvement Municipal. C’est ainsi qu’une page de Recensement des ouvrages clés a été mise en place. Cette sélection pointue d’ouvrages incontournables constitue une première étape vers la constitution de la future bibliothèque numérique. Il s’agit là d’une ressource précieuse pour tous ceux qui souhaitent approfondir leurs connaissances et s’engager dans des actions citoyennes à l’échelle locale et en accord avec ce que nous prônons.

En parallèle, conscient de l’importance de fournir régulièrement du contenu de qualité à notre communauté, nous publierons également des fiches de lecture sur des articles ou des ouvrages pertinents. Ces fiches, présentées sous forme d’articles web, offriront un aperçu détaillé du contenu de chaque ouvrage, permettant ainsi aux lecteurs de se familiariser avec les idées et les concepts abordés.

En conclusion, bien que la bibliothèque numérique du Mouvement Municipal soit encore en cours de construction, son impact potentiel est indéniable. En attendant son apparition, le recensement des ouvrages clés et les fiches de lecture constituent des ressources précieuses pour toutes les personnes désireuses de s’informer et de s’engager dans des actions militantes à nos côtés.

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Bruno Dumont

P’tit Quinquin

Rendre le Nord cinématographique

En sortant P’tit Quinquin, Bruno Dumont a réussi à rendre le Nord Pas-de-Calais cinématographique au travers d’une comédie burlesque. En filmant les paysages et des personnages hauts en couleurs tels que le duo de policer Van Der Weyden/Carpentier, Ch’tiderman ou encore l’oncle Dany dans le village côtier de la Côte d’Opale, Audresselles.

P’tit Quinquin est une mini-série française réalisée par Bruno Dumont (Flandres, La vie de Jésus). La série est d’abord sortie au festival de Cannes en 2014 lors de la Quinzaine des réalisateurs avant d’être diffusée sur ARTE en septembre de la même année.

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Bruno Dumont sur le tournage d’une des premières scènes de P’tit Quinquin

Découvrons ensemble l’un des plus grands réalisateurs français actuels, originaire du Nord, Bruno Dumont, de nombreuses fois récompensé. Je vous préviens tout de suite, son cinéma est très particulier et ne peut pas convenir à tout le monde, sa réalisation étant totalement singulière. C’est un cinéaste qui, plutôt que de chercher à transformer les choses imparfaites dans le but de les magnifier et les rendre esthétiques choisit au contraire de rendre visible les failles, les imperfections, les aspérités, la vraie nature des choses sans travestissement afin de saisir le sublime qui se cache dans cette vérité.

Magnifier la laideur d’un corps

On retrouve cela dans son rapport aux acteurs, il n’engage principalement que des amateurs n’ayant aucune expérience en tant que comédiens, et leur fait jouer de manière décalée, presque grotesque, faisant en permanence ressortir leur amateurisme. Mais, de ce fait, il accentue aussi tous leurs traits singuliers et spontanés, des tics, des maladresses, des hésitations, derrière un vernis ouvertement exagéré et caricatural ressort un relief, une profondeur que peu d’acteurs arrivent à atteindre, quelque chose d’authentique, de réel.

« Pas possible que le meilleur acteur comique jamais vu sur cette planète soit un inconnu du nom de Bertrand Pruvost, encore jardinier il y a quelques mois, qui multiplie les instants de jeu de son plein gré ou à son corps défendant , sans qu’on puisse départager l’un de l’autre. »

Stéphane Delorme, journaliste aux Cahiers du Cinéma
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Le Commandant Van der Weyden et le Lieutenant Rudy Carpentier

Aussi, chose très singulière à son cinéma, il filme sa région, la Côte d’Opale, ses gens et ses paysages. Le décor étant un élément central : un village, une dune, une plage, un bunker tagué. Tout est saisi à l’état brut, et sans artificialiser son décor. Il lui donne toujours une place capitale dans le cadre, il prend la France telle qu’elle est, et non pas telle qu’elle devrait être.

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La plage du village d’Audresselles

Un cinéma plein de contrastes

Son cinéma est avant tout l’art des contradictions et des contrastes : par ses mélanges d’idées et de tons improbables, on ne sait jamais si on doit rire ou pleurer, mépriser ou admirer, être mal à l’aise ou pris de tendresse, et finalement on ressent un peu tout cela à la fois. Des cocktails d’émotions subtiles et uniques qui rendent son cinéma irremplaçable. Cela explique pourquoi d’après nous, le meilleur point d’entrée à son cinéma est la série P’tit Quinquin, une comédie mais qui est entièrement fondée sur des intrigues tragiques. En effet, pour Dumont, le comique n’est pas distinct de la tragédie, il ne sert pas à s’en détourner. Au contraire, il pousse juste un peu le décalage de la mise en scène et du jeu d’acteur, juste suffisamment pour que la tragédie prête à rire. Ainsi, le comique est un prolongement et surtout une transcendance du tragique.

« Le comique rôde autour du tragique, il n’est pas loin. »

Bruno Dumont

Bruno Dumont perpétue l’héritage de Robert Bresson

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Robert Bresson lors d’une projection du Journal d’un curé de campagne

En sortant P’tit Quinquin, Bruno Dumont a une fois de plus affirmé son héritage bressonnien. En effet, le réalisateur au travers ses choix de mises en scène et des thématiques ne fait que confirmer les nombreuses références au cinéma de Robert Bresson.

P’tit Quinquin est une mini-série française réalisée par Bruno Dumont (Hadewijch, L’humanité). La série marque une rupture dans sa carrière déjà de par son format, mais surtout car le réalisateur nous livre une comédie haute en couleur. Mais qu’à donc en commun Bruno Dumont avec Robert Bresson, le réalisateur qui osa dire que « Le cinéma sonore a inventé le silence. »

Nous retrouvons chez chacun d’entre eux des personnages capables des pires actions. Des faits d’une violence inouïe sans que cela soit annoncé au préalable dans le scénario. Rendant la fin de la série d’autant plus belle, en étant au cœur du mal. Cette violence faisant d’autant plus contraste avec la banalité des vacances d’été, mais surtout des quelques scènes de grande tendresse. Bresson faisait de même dans L’argent, nous amenant dans une incompréhension, surprenant complètement notre pensée.

Chaque partie du corps est autonome

Dans Un condamné à mort s’est échappé, Bresson souhaite offrir à chaque instant et à chaque geste du corps une autonomie propre. En brisant les hiérarchies, il donne alors une volonté aux différents membres. Cela permet d’insuffler pour la première fois au cinéma une perception de la puissance du mouvement. Bruno Dumont joue d’une même « dé-liaison des corps » . On le remarque principalement dans le jeu du Commissaire qui divague à tout va, se mettant même à ne plus savoir marché dans la cour d’une ferme.

 Oscars aux acteurs dont le corps, la figure, la voix, ne font pas l’effet d’être à eux, ne donnent pas la certitude qu’ils leur appartiennent. »

Robert Bresson, Notes sur le cinématographe

Le réalisateur, au montage va se servir et profiter de la science de l’acteur. En fragmentant par le choix des plans et des actions, celui-ci valorisera ces éléments. Et le travail sur la bande-son en privilégiant les bruits par rapport aux paroles ne fera que rendre les aspérités de ces actions que plus spectaculaires.

« [Le montage] C’est quasiment de la sculpture. C’est du retrait… »

Bruno Dumont

« Condamnés sont les films dont les lenteurs et les silences se confondent avec les lenteurs et les silences de la salle. »

Robert Bresson, Notes sur le cinématographe
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Jean-Gabriel Périot

Une jeunesse allemande

Aujourd’hui je vous propose le documentaire de Jean-Gabriel Périot, Une jeunesse allemande qui est sorti en 2015. Le film retrace de manière chronologique les événements de la Rote Armee Fraktion, une organisation d’extrême gauche en Allemagne (comme vous vous en doutez). Mais pas dans n’importe quelle Allemagne, en RDA dans les années 1960-1970.

Le documentaire ne se construit qu’à partir d’archives visuelles et sonores de l’époque. Il illustre parallèlement les productions idéologiques et cinématographiques des membres de l’organisation ainsi qu’un regard des médias télévisuels dessus. Nous offrant ainsi une fresque inédite sous tous les angles.

Ce documentaire a demandé 9 longues années de travaux au réalisateur, car les Allemands n’ont pas de services de conservations des archives (en général, mais surtout visuels) comme nous pouvons l’avoir en France. L’INA et les cinémathèques étant l’un des grands avantages de ce centralisme français nous permettant de conserver au mieux ces productions.